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Les accompagnements raisonnables

Photographe Antoine Ryan
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L’été s’en vient, c’est le temps des barbecues. « Yezzire! »

On commence avec un peu de culture. Le mot « barbecue » vient du grec barbos qui signifie « viande cuite » et cuyos qui signifie « accompagnements de marde ».

Évidemment, c’est pas vrai. Mais ce qui est vrai, c’est qu’y’a pas grand-chose qu’on « butche » plus que le choix des accompagnements de barbecue. On achète tout le temps ça par obligation, en se disant : « Ben là… J’suis pas pour manger juste de la viande… »

Fait qu’on ramasse ça en vitesse, juste avant de pogner une 12 de Corona pis un sac de Doritos. On arrive à la caisse avec un sentiment de satisfaction. « Cool! J’ai maintenant un repas équilibré! » Ben oui. Équilibré comme un gars saoul qui fait de l’unicycle.

Les grands classiques

  1. La salade de chou turbo-trop-verte. Tellement chimique que la date d’expiration va survivre à tes petits-enfants. Tellement fluo que t’enlèves le couvercle pis tu peux t’en servir comme lampe de poche. Tellement radioactive qu’après trois bouchées, tu sens pu ta langue, t’as des étourdissements pis une douleur dans le bras gauche.
    En 2004, j’ai fini un bol de 500 ml. Depuis ce temps-là, j’ai une vision trouble, j’fais de l’acouphène et mon urine a la même couleur que la face à Hulk.
  2. La mayo motonneuse. Aussi appelée « salade de patates ». Ils mettent toujours 10-12 morceaux d’échalotes dedans. C’est pour te donner l’impression que tu manges santé. Alors que le reste du monde a plus l’impression que tu pues de la yeule.
    C’est facile de « spotter » qui a mangé ça. C’est celui qui coupe ses mots en soufflant par en haut une fois de temps en temps. Bravo mon chum. T’es un ninja. Personne t’a vu roter.
  3. La salade de macaroni. Idem à la salade de patates, mais en plus mou. En fait, c’est tellement mou que mâcher ça, c’est une option. Tu peux la « gober » direct comme un héron « gobe » un poisson. Swooosh-Gloup-Fini. « Enweye » la bière.

Chaque été, ces trois accompagnements rajoutent à nos corps cinq livres en trop et un 18 roues d’anticorps. Sur l’emballage, à côté de « information nutritive », c’est écrit : « Es-tu sérieux, man? »

Les pros qui gossent

Mais si t’es un pro du barbec, t’achètes pas ça. T’arrives avec tes légumes pis ton papier d’alu pour faire des papillotes. C’est-à-dire prendre les trois quarts de la grille pendant 45 minutes pour faire cuire tes osties d’carottes. On aime dont ça ce monde-là.

Pour vrai, j’suis jaloux des papilloteux. Parce qu’au moins, c’est santé! Chez nous, j’me force pour manger santé. J’achète du bio, je mange mon poids en fruits et légumes, j’me fais des jus verts… (C’est peut-être pour ça aussi que j’ai la pisse à Hulk…) Bref, je fais attention.

Mais pour un barbecue, j’prends un break. Un barbecue, c’est festif. Et de mémoire, j’pense que j’ai jamais crié : « Stie que c’est le party dans ma yeule! », en broutant des feuilles de kale.

Le degré zéro

J’ai déjà apporté des chips cuites au four : zéro additif, zéro gras trans, zéro plaisir. Un apport de 100 % de votre dose quotidienne de déception. En finissant l’sac, j’me sentais comme si je venais de finir une saison de Yamaska. Sur mute. Dans une salle d’attente. Assis à côté d’un gros monsieur qui vise ma face pour tousser creux.

J’ai essayé des burgers de tofu. WTF le tofu? Tu veux savoir ce que ça goûte du tofu? Prends une grande respiration pis mâche dans le vide. C’est ça.

Pis le monde qui dit : « C’est l’fun! Y’a presque pas de calories dans le tofu! » J’espère! Ç’a autant de goût qu’un verre de styromousse! C’est du vide! Du vide moelleux! J’suis sûr que tofu en latin, ça veut dire « néant »! J’suis sûr que les trous noirs sont faits en tofu! Qu’avant le big bang, y’avait du tofu! Que le cerveau de Kim Kardashian est en tofu! Que les tounes de Nicola Ciccone sont en tofu! Qu’entre Saint-Hyacinthe pis Drummondville, c’est du tofu!

« F**k you » le tofu!

Les mains propres

J’fais des shows d’humour dans les écoles. Un peu partout, y’a des écriteaux qui disent comment se laver les mains en neuf étapes. T’as bien lu. Neuf étapes. Comme dans l’expression : « On finit-tu avant Noël, bout d’viarge? »

Neuf étapes! Quand tu finis, non seulement t’as pu de bactéries, mais t’as pu de main! Tu penses que le lavabo est rempli de cheveux, non. C’est tes lignes de la main qui ont crissé l’camp. Y te reste juste deux gros moignons de corne à la place des bras.

Et c’est bien connu, qu’est-ce qui contient un maximum de bactéries au pouce carré? Une poignée de porte. Et qu’est-ce que tu touches tout de suite après t’être lavé les mains? Une poignée de porte.

Fait que tu te relaves les mains. Pis tu retouches la poignée, pis tu te relaves les mains… Non-stop jusqu’à ta mort. Ou jusqu’à tant que tu « catches » que tu peux ouvrir la porte en tenant du papier brun. Imagine le jeune de 15 ans qui vit ça. Le soir, il rentre chez eux :
  Salut P’pa!
– Salut Max… Le directeur m’a dit que t’as manqué trois cours aujourd’hui.
– Ben oui… J’me lavais les mains en neuf étapes. 127 fois de suite.
–  Hein?
– Ouin. Une poignée de porte attaquait ma salubrité à répétition.
–  
–  On a-tu du Purell?

La question qui tue

Là, je sais, la moitié des lecteurs se dit : « Pourquoi tu me parles de lavage de mains, Mat? Me semblait qu’on jasait de barbecues… » Pogne pas les nerfs, le lien s’en vient. Tu vas voir.

L’autre moitié se dit : « Tu devrais montrer l’exemple au lieu de dénigrer ceux qui se lavent les mains correctement… »

Boaf. M’en fous. Anyways, ces personnes-là me lisent pas : ils sont dans la douche. Quand tu te laves les mains en neuf étapes, ça doit bien te prendre huit ans pour laver le reste…

Hier, je passe m’acheter du stock pour un barbecue, j’arrive devant les fruits – un accompagnement idéal et santé – et là, j’me pose la question : « Pourquoi on ‘’freake’’ autant avec les mains sales et pas avec les fruits? »

Tout le monde le sait : y’a tellement de pesticides que nos fruits sont rendus plus chimiques que les bobettes à Jian Ghomeshi. Et on dit quoi? « Passe tes fraises en dessous de l’eau, ça va être correct! »

J’suis pas un spécialiste, mais si les pesticides ont « toughé » 60 jours et 20 pluies sur ma fraise, ça se peut-tu que mon 5 secondes de rinçage changera pas grand-chose?

Sont où les pancartes : « Lavez vos fraises en neuf étapes? »

Fait que tout content, j’achète des fruits bios. J’arrive au barbecue, je regarde sur l’emballage, c’est écrit : « Sans pesticide. » Yay!

Juste en dessous, c’est écrit : « Cueilli à la main. »

F**k.

(Article publié dans l’édition #137 mai 2016 – www.boutiquesummum.com)

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