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ENTRE DEUX JOINTS, ON POURRAIT MANGER QUELQUE CHOSE

Kim Lavack Paquin
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Parfois, en voyage, on rencontre des gens avec qui on fraternise rapidement, l’instant d’un trajet, soit dans un autobus cahotant à flan de montage, squeezé entre une cage à poule et un élevage de cochons dingues ou, pire, dans un vol d’Air Canada outre atlantique, ou encore le temps d’un séjour dans un tout inclus avec trop de bouse pis pas assez de soleil. Bref, peu importe les circonstances, si vos chemins se sont séparés avec une invitation ouverte mutuelle du genre « si jamais tu passes proche, viens chez nous! », il ne faut donc pas se surprendre de ravoir des nouvelles de ce quelqu’un nous annonçant une visite prochaine dans notre bout, en sous-entendant qu’un « sofa » serait le bienvenu. Encore mieux pour tout le monde si tu as une chambre d’ami!

C’est ainsi que je reçois un jour un message de John, un jeune vieux bonhomme de 72 ans originaire de la Californie, qui m’annonce son arrivée imminente en s’informant d’une possibilité d’hébergement. J’avais marché avec John et son fils les derniers miles menant à Saint-Jacques-de-Compostelle. C’est ce dernier qui m’avait par la suite accueilli chez lui en Espagne quelques semaines plus tard. Le party avec sa gang de chums a duré deux jours – je ne me souviens même pas d’avoir dormi-là ou, rendu-là, dormi tout court, mais c’était une place où déposer mon sac et prendre une douche avant de reprendre mon chemin vers le Portugal. Il y avait donc eu service rendu. 

Et voilà que le fils avait donné son « coupon » à son père, un grand vadrouilleur devant l’éternel.

J’ai décidé d’honorer le coupon. J’ai bien fait. John était un ancien hippie super drôle pis vraiment relax. En plus, le bonhomme est arrivé avec du chocolat dans ses valises. Et là, je ne parle pas ici d’une Toblerone du Duty Free. Non monsieur! Déjà, qui n’aime pas le chocolat? Bon, j’imagine qu’il y a en a qui n’aime pas ça – comme des gens tristes. Bien sûr, je comprends qu’on peut ne pas « capoter » sur le chocolat, t’sais on n’est pas tous comme ceux qui en ont besoin tous les jours, comme d’un fix, et qui le mange en cachette en faisant hum ha ha humm… Moi-même je ne ressens pas le besoin d’en consommer tant que ça, mais de là à dire ouache! Ça mérite une psychanalyse. 

En-tout-cas… je termine cet aparté sur le chocolat là-dessus, parce que de toute façon on ne parle pas ici de ce type de chocolat ordinaire-là. Non. Le chocolat de John… ce chocolat-là… Eh boboy!

PAS JUSTE UNE QUESTION DE GOÛT… QUOI QUE

Vous m’aurez vu venir avec mes deux doigts dans le bain-marie, c’était du chocolat au pot. Pas une « batch » maison, mais un produit de consommation avec un emballage pis toute… Aujourd’hui monnaie courante, mais à l’époque le marché venait à peine d’exploser en Californie, en marge des assouplissements de la loi là-bas en regard à la consommation et à la distribution de la Ganja. Phénomène qu’on allait connaître de ce côté-ci de la frontière deux ans plus tard.

Je n’en n’étais pas à mon premier nanan de type « brownies », et ce n’est pas le fait de savoir que j’allais buzzer bientôt qui m’emballait autant que le soudain constat frappant de l’astronomique potentiel commercial du produit que j’avais entre les mains. De plus, John en était lui-même le producteur, ayant vendu sa compagnie de comptabilité pour se lancer de son sous-sol dans l’aventure de la confection et la distribution de tout ce que tu peux faire avec du pot. Le rêve américain existe encore à 72 ans. Ça ne s’invente pas. 

Le palette de chocolat en question était plus de la forme d’une puck de hockey, quoi que moins épaisse. En ouvrant son petit coffret, on trouvait la rondelle séparée en 12 petits cartiers. Je commençai par un, tranquillos. C’était du chocolat à saveur de cerise. Et de pot. Surtout à saveur de pot. Mais voilà que le mariage de ces trois goûts, cette Sainte Trinité aromatique que formaient le chocolat, la cerise et le pot, aussi étrange que puisse paraître cette association diabolique, était, comment dire… tout simplement divin. À ce point que j’en salive encore des années plus tard en écrivant ces lignes. Je serai franc, jusque-là je n’avais jamais vraiment trouvé que le bon vieux « brownie » était si bon au goût. Rien pour m’empêcher de bouder mon plaisir, mais mettons qu’en général, je trouvais que pas mal toutes les recettes au pot goûtaient fort le gazon. Alors que dans ce cas-ci, le fameux côté pugnace du pot était atténué, mais son arôme restait néanmoins la trame principale de l’expérience gustative. Son parfum distinct se mariait à merveille au velouté du chocolat et à la fraicheur de la cerise. Bref, ça goûtait bon en simonac!

ON N’EST JAMAIS AUSSI BIEN SERVI QUE PAR SOI-MÊME

Pour se lancer dans l’expérimentation culinaire avec du cannabis, l’idée n’est pas de simplement saupoudrer du pot dans son spag… Il reste essentiel, comme avec toute chose, d’aborder l’aventure avec stratégie et connaissances. Expérimentez prudemment avec le dosage, en comprenant la puissance des produits et les effets souhaités que vous recherchez. Explorez des recettes spécialement conçues pour l’infusion de cannabis et n’hésitez pas à demander conseil à « Google ».

PETIT COURS 101

Il est intéressant de savoir que le THC que l’on retrouve dans la plante se présente naturellement sous la forme d’acide tétrahydrocannabinolique, ou THCA, qui n’est pas psychoactif en soi. Ce n’est qu’après avoir chauffé le THCA, dans le cadre d’un processus appelé décarboxylation, qu’il se transforme en THC. En gros, une salade avec quelques feuilles fraîches, un peu comme on ajouterait de la menthe à une salade de choux, ne buzzera pas vraiment, mais ça goûterait. Je dis ça, je dis rien.

Ce sont les terpènes du cannabis qui sont les composés aromatiques responsables des parfums distinctifs de la plante et qui contribuent à la complexité et à la profondeur des saveurs de chaque souche. Allant des notes d’agrumes et florales aux nuances terreuses et de pin, il y en a une variété impressionnante aux différences parfois subtiles et qui pourraient se marier – ou pas – à merveille à vos recettes.

COMMENCE PAR DE L’HUILE PIS DU BEURRE

Pour en faire, la première étape consiste à décarboxyler votre cannabis pour en libérer les effets psychoactifs et permettre également aux lipides du beurre et de l’huile de se lier facilement au pot pour une meilleure infusion. La meilleure technique est à la cuisson sous vide, mais comme ce n’est pas donné à tout le monde, je vous explique ici la plus simple, soit celle au four. Commence par casser délicatement les cocottes en gros morceaux et étale uniformément ça sur une plaque à pâtisserie tapissée de papier sulfurisé. Fais-la glisser sur la grille centrale du four et cuire à 110°, jamais plus haut que 120°, 45 minutes environ. Encore là, effectue tes recherches selon la fraîcheur et la variété. Le résultat est ce que tu vas utiliser pour infuser. Tu peux utiliser le cannabis de ton choix – sélectionné pour ses saveurs et aussi pour ses effets parce que les deux vont être dans ta face. 

Pour l’huile, tu peux faire ça dans différents types d’huiles de cuisson, comme l’huile d’avocat, de sésame, de noix de coco ou, bien sûr, d’olive. Fais ça à basse température, laisse ça mariner pendant au moins quatre à cinq heures pour éviter de convertir encore plus de THCA en THC, ce qui perturberait tes calculs minutieux. Les novices ont tendance à s’en sortir mieux avec de 3 à 5 milligrammes de THC au cours du repas, tandis que les consommateurs de cannabis expérimentés iront jusqu’à 1000 milligrammes. Mais, ne me prends surtout pas au mot et effectue tes recherches.

Bien sûr tu peux aussi faire du beurre et même du guee, qui est en fait du beurre clarifié et qui est meilleur pour la santé. C’est si simple que je te laisse aller voir la technique par toi-même.

FAIS TON CORDON BLEU

Que ce soit un poulet sur le grill badigeonné d’un chimichurri especial ou une bavette aux champignons sauvages, sauce vin blanc et beurre de pot, mon petit doigt me dit que ce ne sont pas les options qui manquent et que tu peux laisser libre cours à ton imagination gastronomique. Dans ce voyage exploratoire aux confins des possibles gustatifs, il te faut garder en tête une seule chose : laisse-toi de la place pour le dessert.

Crédit photo : Patrick Séguin - www.patrickseguin.ca
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